EXPOSE EN FAVEUR DU DELAI DE GRACE

présenté par M. Farag MOUSSA©
Président de la Fédération internationale des associations d'inventeurs (IFIA)
(e-mail: invention-ifia@bluewin.ch)

A L'AUDITION

DE LA COMMISSION EUROPEENNE
SUR LE DELAI DE GRACE

Les sous-titres ont été ajoutés pour les besoins de publication

(Bruxelles, 5 octobre 1998)

 

L'IFIA : Pour un délai de grâce général et de 12 mois

L'IFIA est la seule organisation groupant les associations d'inventeurs du monde entier, dont une bonne moitié fait d'ailleurs partie de la grande Europe. Merci donc à la Commission européenne de donner aux inventeurs, à travers moi, leur porte-parole, l'occasion de s'exprimer aujourd'hui longuement et en détail sur le thème qui nous intéresse. Et il nous intéresse beaucoup, croyez-moi !

De fait, très vite après sa fondation à Londres en 1968, l'IFIA a été convaincue des avantages que le délai de grâce offrait aux inventeurs. L'IFIA s'est d'ailleurs exprimée à ce sujet au cours du premier forum international jamais organisé sur ce thème. C'était il y a quinze ans, en 1984, à Genève. L'OMPI avait convoqué un comité d'experts.

La position de l'IFIA n'a jamais varié sur le principe. Nous sommes pour un délai de grâce général, c'est-à-dire quelle que soit la circonstance, le lieu ou le type de divulgation, que celle-ci soit écrite, orale ou visuelle. Nous sommes aussi pour un délai de grâce de douze mois. Cette période nous paraît en effet nécessaire et elle correspond d'ailleurs à la tendance générale des législations actuelles.

Mais qu'on ne s'y trompe pas. Pour nous, il ne s'agit pas d'encourager la divulgation prématurée d'une invention. Notre but est d'offrir à l'inventeur un moyen, certes limité dans le temps, de se protéger contre la perte de la nouveauté de son invention - et par conséquent de sa brevetabilité, et ce à la suite d'une divulgation précoce involontaire ou inévitable parce que nécessaire.

Quand j'y pense, je vois les inventeurs européens comme des otages. Les otages de ceux qui n'acceptent l'idée du délai de grâce en Europe qu'à condition que les Etats-Unis, de leur côté, acceptent chez eux le système du premier déposant. C'est dire que j'espère qu'il ne sera discuté aujourd'hui, à Bruxelles, que des avantages ou des inconvénients du délai de grâce, sans entrer dans cette sempiternelle polémique, en fait de nature politique, polémique dont le seul résultat est de porter préjudice aux intérêts des inventeurs européens.

J'irais jusqu'à dire que même si le délai de grâce n'existait pas aux Etats-Unis, il nous faudrait l'inventer pour l'Europe, rien que pour l'Europe. Soyons originaux. Ce qui ne nous empêche pas, à l'IFIA, notez-le bien, de voir plus loin, de lutter encore et toujours pour l'adoption d'un délai de grâce général et universel. Je compte d'ailleurs, aussitôt après cette audition, lancer à travers nos associations d'inventeurs une campagne mondiale dans ce but.

Les inventeurs indépendants déposent plus de 30% des demandes de brevet

Ceci dit, j'ai consulté les associations d'inventeurs des pays membres de l'UE /OEB, qui sont aussi membres de l'IFIA. Toutes sont en faveur du délai de grâce, à l'exception de celle de la Suède. J'y reviendrai plus tard.

Mais qui représentons-nous à l'IFIA ?

Avant toute chose, les inventeurs indépendants, le groupe principal. Je connais certes les limites de toute statistique. Je crois néanmoins pouvoir avancer sans trop me tromper que dans les pays de l'UE / OEB, les inventeurs indépendants résidents dans ces pays (mentionnés comme personnes physiques dans les statistiques) sont les auteurs de plus du tiers de l'ensemble des inventions déposées par des résidents. Plus d'un tiers, ce n'est pas peu.

Voici quelques chiffres. Ce sont des moyennes basées sur des sources officielles (Lettres des Offices de brevet desdits pays et, pour la France, le rapport de Didier Lombard Le brevet pour l'innovation, Paris, 1998, pp. 42 et 130):

Autriche : 41%
Finlande : 35%
Suède : 34%
France : 30%
Royaume Uni : 26%
Italie : 24%

Le cas de l'Allemagne mériterait un examen plus critique, puisque les statistiques officielles donnent un chiffre moyen qui n'est que de 16 à 17%. A titre d'information, la Norvège, qui n'est pas membre de l'UE / OEB, a un chiffre moyen de 52%.

Le deuxième groupe que représente l'IFIA - lequel n'est pas inclus dans cette moyenne de 30% dont je viens de parler - est constitué par des micro et petites entreprises, généralement créées par, ou grâce à un inventeur indépendant qui s'est mis à son compte.

Les inventeurs indépendants sont à l'origine
de nombreuses grandes entreprises industrielles

Je sais, je sais, le terme d' "inventeur indépendant" fait sourire certains : "Une bande de farfelus. Rien de plus !". Ils oublient que de grandes découvertes, de grandes inventions, sont l'oeuvre d'inventeurs indépendants, précisément. Ils oublient qu'à l'origine de quantité de grandes entreprises industrielles d'aujourd'hui, à l'origine de milliers et de milliers d'emplois, il y a un inventeur indépendant, lequel a d'ailleurs bien souvent donné son nom à l'entreprise.

Voulez-vous un exemple ? Voici l'histoire d'une femme de 35 ans, une femme au foyer comme des millions d'autres. Cette Allemande qui habitait à Dresde, fut l'auteur, en 1908, d'une invention que tous les amateurs de café, vous, moi, ont utilisé ce matin. Il s'agit du filtre à café Melitta lui-même. Ou de son amélioration, sous une forme ou une autre. Melitta Benz, l'inventrice, créa une entreprise, laquelle porte également son nom, Melitta. L'entreprise Melitta emploie aujourd'hui 8000 personnes dans 18 pays différents, avec un revenu annuel de 950 millions de US$.

Pourquoi le délai de grâce est-il indispensable ?

A mon avis, presque tout a déjà été dit au sujet du délai de grâce il y a quinze ans, en 1984. Il suffit de lire le document final du Comité d'experts convoqué à l'époque par l'OMPI. Les opposants au délai de grâce connaissant parfaitement les arguments développés en sa faveur, ce n'est pas en y revenant que je les ferai changer d'avis. Je me contenterai donc de rappeler rapidement ici, pêle-mêle, les points principaux de ce document de l'OMPI,. Il s'agit ici de la divulgation volontaire ou involontaire de l'invention dans les circonstances suivantes:

1. Méconnaissance de la loi.
2. Nécessité de tester.
3. Recherche de financement.
4. Désir ou nécessité de faire connaître son invention à travers une publication ou dans une exposition.
5. Désir ou nécessité de parler publiquement de son invention.
6. Divulgation d'un idée alors que l'on est pas encore conscient qu'il s'agit d'une invention potentielle.

En privant l'inventeur du délai de grâce, on le dessert terriblement. On le pousse à demander prématurément une demande de brevet, ce qui bloque son invention à un stade où elle aurait peut-être besoin d'une amélioration qui lui donnerait davantage de chances. Ceci oblige aussi l'inventeur à débourser encore davantage. Et qu'on ne vienne pas nous dire qu'en Europe un brevet ne coûte pas cher. Breveter, ce n'est pas seulement payer une taxe de dépôt - je sais, je sais, en Angleterre cette taxe ne coûte qu'une somme très modique. Mais écoutons plutôt à ce sujet Forskapatent, une institution suédoise qui, croyez-moi, sait de quoi elle parle:

Forskapatent does not file patent applications for all inventions disclosures it receives due to the high cost of filing ($ 6.000 to $ 10.000) in Sweden only.

Le délai de grâce destiné aux expositions internationales est un leurre

Certains avancent qu'un délai de grâce de six mois existe déjà dans le cas d'inventions présentées dans le cadre d'expositions internationales. Pour cela, ils se réfèrent à l'article 55 (1) (b) de la Convention sur le brevet européen de 1973. Je me suis renseigné auprès du président de l'OEB en personne. Je lui ai réclamé la liste des expositions internationales pour l'année 1998 qui répondaient à la définition qu'en donne l'article en question. Tenez-vous bien, il n'y en avait qu'une seule ! L'Exposition mondiale de Lisbonne sur le thème des océans - à laquelle aucun inventeur n'a participé, et ne peut d'ailleurs participer.

Cette disposition de l'article 55 (1)(b), que l'on retrouve dans toutes les législations des pays de l'OEB, n'est donc qu'un leurre. Pauvres inventeurs ! Il y a celui qui, croyant sincèrement être protégé par le délai de grâce, montre son invention dans une exposition internationale, sans savoir qu'une fois exposée, il ne pourra plus la breveter. Il y celui qui ayant finalement compris, parfois à la dernière minute, que ce fameux article 55 (1) (b) ne vaut pas pipette, court enregistrer son invention auprès de l'office de brevet le plus proche, alors que son invention n'est pas encore au point. Pour finir, il y a celui qui n'y comprenant plus rien, renonce carrément à exposer.

Certains pays accordent un délai de grâce dans le cas d'une communication publique ou d'un essai technique

Ceci dit, il existe quelques pays qui accordent un délai de grâce pour les communications faites devant un public composé de scientifiques. Il s'agit là bien sûr d'inventions faites par des chercheurs. En Europe, je citerai la loi sur les brevets du Portugal. En Asie, les lois du Japon, de la République de Corée et de la Chine populaire. Mais attention, les chercheurs de ces pays ne pourront jouir du délai de grâce pour leur invention que dans des pays offrant les mêmes conditions. D'autres pays accordent un délai de grâce pour des essais techniques, comme l'Espagne et l'Afrique du Sud, par exemple.

Le système du premier déposant est tout à fait compatible avec un délai de grace général et de 12 mois

Mais revenons à l'idée du délai de grâce général d'une durée de douze mois, un délai appliqué en toutes circonstances et à tous ceux et celles qui inventent - et qui est le but pour lequel je me bats avec tant d'acharnement.

On brandit toujours, à titre d'exemple, le cas des Etats Unis, mais il y en a bien d'autres. Le Canada, par exemple, un cas d'école. Le Canada, qui bien qu'ayant abandonné il y a trois ans le système du premier inventeur pour celui du premier déposant, n'en a pas moins maintenu le délai de grâce. Je pourrais citer encore d'autres pays du continent américain : l'Argentine, le Brésil, El Salvador, la Barbade, etc... Ou de l'Asie centrale : l'Arménie, le Kazakstan...

Mais pourquoi chercher si loin ? Il nous suffit de regarder les pays de l'Europe centrale et de l'est pour découvrir que là-bas aussi les inventeurs disposent d'un délai de grâce général de douze mois. Ces pays sont au moins au nombre de neuf, que je citerai par ordre alphabétique: Albanie, Belarus, Bulgarie, Estonie, Moldavie, Roumanie, Slovénie, Turquie, Ukraine.

Cette liste de 16 pays n'est pas négligeable. Elle montre que le délai de grâce fonctionne parfaitement avec le système du premier déposant. Elle met également en lumière le fait que le mouvement en faveur du délai de grâce ne fait que s'amplifier. Elle fait ressortir que plusieurs lois sont inspirées de l'article (12) du projet de Traité sur le droit des brevets, texte sur lequelle se fonde d'ailleurs le député au Parlement européen, Monsieur Rothley, pour proposer l'introduction du délai de grâce général de 12 mois au niveau des pays de l'Union européenne.

Une initiative des pays de l'Union européenne est nécessaire si l'on veut déboucher sur un délai de grâce universel

Beaucoup dans cette salle soutiendront que le délai de grâce n'a de sens que s'il est appliqué universellement, et ils auront raison. Le délai de grâce n'aura de véritable sens que s'il est généralisé. C'est d'ailleurs très précisément ça que nous réclamons ! Que le délai de grâce soit adopté par tous les pays du monde ! Ceci dit, est-il vraiment nécessaire d'attendre, pour l'adopter au sein des pays de l'Union européenne, que... disons.. la Papouasie, s'y mette elle aussi ?! Pourquoi ne pas adopter une directive spéciale au niveau de l'Union européenne concernant le délai de grâce ? Pourquoi l'Union européenne ne prendrait-elle pas le leadership d'un tel mouvement - lequel finirait bien par déboucher un jour sur une adoption universel du délai de grâce ?

"Eduquer" les inventeurs ? Mais de qui se moque-t-on?

L'UNICE, qui se déclare catégoriquement contre le délai de grâce, propose comme alternative que l'on "éduque" les inventeurs indépendants, les PME et les chercheurs, en leur apprenant comment fonctionne le système de brevet en général. Mais comment l'UNICE envisage-t-elle le financement d'un tel programme ? Qui paiera la facture ? Le document présenté par l'UNICE à l'audition de septembre 1995, à Munich, nous en donne une idée. Ce ne sera pas l'OEB, pas plus que les offices nationaux de brevets, tant il est vrai que l'on n'imagine pas les déposants ouvrir leur porte-monnaie pour éduquer leurs concurrents potentiels. L'UNICE et la grande industrie qu'elle représente renvoient donc la balle à la Commission européenne et à ses Etats membres : à eux de payer la facture - s'ils le veulent bien sûr.

Ceci dit, parlons chiffres. Et raisonnons. L'Association des inventeurs de Suède (SUF), a décidé tout récemment de ne pas soutenir le délai de grâce. Elle se contentera, dit-elle, de poursuivre les efforts qu'elles a entrepris depuis de nombreuses années dans le but d'éclairer les inventeurs sur leurs droits. Pour ce programme éducatif, SUF dispose pour l'année 1998 de 7.5 millions de SEK, c'est-à-dire d'environ 900.000 US$. Cette somme sert à couvrir les salaires de 28 conseillers répartis dans les différentes régions de la Suède, ainsi que les frais inhérents aux réunions, cours, frais administratifs, etc.

Extrapolons l'exemple de la Suède, avec près de 9 millions d'habitants, à l'ensemble des pays membres de l'Union européenne. Les quinze pays actuellement membres de l'Union européenne représentant plus de 370 millions d'habitants, il leur faudrait par conséquent environ 37 millions de dollars par année, pas moins, à mettre à disposition des associations d'inventeurs, autres que l'association suédoise. 37 millions de dollars que nos associations de l'UE / OEB sauraient utiliser à bon escient, croyez-moi. Y compris pour faire connaître à nos inventeurs toutes les arcanes de ce délai de grâce que nous considérons, je le répète, comme absolument indispensable à leurs intérêts.

Soulignons que cette proposition de l'UNICE n'est pas nouvelle, puisqu'on la trouve dans le document du Comité d'experts de l'OMPI de 1984, il y a quinze ans déjà. A cette idée, à savoir d'éduquer les inventeurs comme alternative au délai de grâce, il fut d'ailleurs clairement répondu à l'époque :

... fréquemment, et probablement dans la majorité des cas, les inventions sont divulguées prématurément non pas à cause de l'ignorance mais en raison des nécessités d'une situation particulière (par exemple, une divulgation qui ne peut pas être confidentielle faite à un intéressé ou aux fins de l'expérimentation).

On parle de l'ignorance des inventeurs indépendants, des PME, voire des chercheurs. Mais les inventeurs salariés travaillant dans les grandes entreprises et les multinationales, ont-ils davantage de connaissances du domaine du droit des brevets ? J'en doute. Un département de brevets appartenant à l'entreprise, lequel compte des dizaines, voire des centaines de juristes, est là pour veiller au grain.

J'ai rencontré l'autre jour, à Genève, Nicolas Hayek, le grand chef d'entreprise suisse, le fameux créateur de la Swatch - lequel se définit d'ailleurs comme "entrepreneur et artiste". Je suis persuadé que Monsieur Hayek dirait comme moi. C'est-à-dire : à chacun son métier, les vaches seront mieux gardées. Qu'on laisse les inventeurs, les chercheurs à leur imagination. Qu'on laisse les juristes à leurs bréviaires juridiques.

Le monde change . . .

Je voudrais rappeler pour conclure que le monde change.

D'abord il n'y a pas que des inventeurs hommes. Il y a les inventrices, les grandes exclues du monde de l'invention, qui émergent de plus en plus. Or beaucoup d'entre elles ne partagent pas le système des valeurs instauré par les hommes autour du droit des brevets; notamment la notion du secret, ou encore cette forme de compétition qu'est la course effrénée pour le dépôt du brevet. Les inventrices, les femmes en général, sont en effet souvent plus enclines au partage. Elles partagent plus facilement leurs idées, leurs connaissances. Les femmes, par nature, communiquent plus facilement, plus ouvertement. Le délai de grâce correspond mieux à leur nature.

Et puis il y a les jeunes, tous ces futurs inventeurs et inventrices qui se pressent à l'horizon. Comment concevoir l'organisation de concours ou d'expositions consacrées à la jeunesse, sans leur octroyer un délai de grâce ? Sans protection, on risquerait de leur voler leurs idées, d'autant plus qu'en général les jeunes ne sont pas intéressés à l'exploitation et à la commercialisation de leurs inventions. Le même danger guette, dans le cadre de leurs examens de fin d'étude, les travaux et les prototypes conçus par les élèves des écoles techniques, ou par les étudiants des instituts technologiques.

Il y a les expositions d'inventions, qu'elles soient nationales ou internationales, qui en Europe se répandent de plus en plus. Le délai de grâce, qui depuis longemps avait été prévu à leur égard, mais qui, comme nous l'avons vu tout à l'heure, est resté lettre morte jusqu'à aujourd'hui, devrait être ressuscité dans le cadre d'une institution d'un délai de grâce général de douze mois. Ceci vaut également, bien sûr, pour les concours d'innovation, de plus en plus nombreux en Europe eux aussi.
Il y a aussi les parcs technologiques, un phénomène relativement récent en Europe. Ces parcs représentent un monde interactif, un monde où l'on communique, un monde où l'on s'entraide entre petites entreprises innovantes. Comment concevoir leur développement sans un délai de grâce ? Cela frise l'absurde. Je dirais même l'injustice.

La grande industrie n'a pas besoin d'une loi pour s'offrir un délai de grâce

Un parc technologique composé d'une vingtaine de micro ou petites entreprises, sera toujours plus petit que ces colosses que sont les grandes entreprises, sans parler des multinationales. Or ces colosses pratiquent de fait, dans le cadre de leurs entreprises, à l'intérieur de leur propre système, le délai de grâce ! Leurs ingénieurs se consultent. Leurs inventions sont longuement testée, bien protégées entre quatre murs. Leurs spécialistes font leurs enquêtes sur les marchés potentiels. Leurs bureaux de brevets prennent en main toute la partie juridique, déposant les brevets au moment où ils le jugent opportun.

L'Internet mène à tout

Mais il y a surtout l'Internet, le e-mail et le Web site, bref cette électronique qui bouleverse notre société comme ce fut le cas, il y a des siècles, avec la découverte de l'imprimerie. Un nouvel environnement est né. Il a chamboulé la communication : plus de distances, plus de frontières. Une nouvelle culture est née : libre, rapide, universelle, on partage ses connaissances, ses compétences. Un formidable potentiel interactif bourgeonne sur notre planète Terre et, que cela plaise ou non, personne ne pourra l'arrêter.

Et nos inventeurs dans tout ça ? En offrant le libre accès à l'information - et de plus à un prix dérisoire - l'Internet fissure l'un des fondements même du système de brevets européen, à savoir la notion de la nouveauté absolue sans aucune exception, et celle du secret. Comment ne pas voir, alors, qu'un délai de grâce s'impose de lui-même ?

Les possibilités de l'Internet sont sans limites, n'oublions pas que nous n'en connaissons encore aujourd'hui que quelques unes. Des expositions virtuelles d'inventions existent déjà. Une de nos associations, celle de la Hongrie, a d'ailleurs lancé en mars dernier une grande première : un concours international d'inventions avec un jury virtuel, chaque juré étant tranquillement chez lui, quelque part dans le monde, assis devant son petit écran. Des prototypes virtuels (eh oui !) existent bel et bien aujourd'hui. Saisis sur Internet, ils sont ensuite enregistrés sur video. On voit l'invention sous tous les angles, en couleurs, animée, avec un commentaire, et même parfois agrémentée d'une musique de fond. De cette video, l'inventeur fait des copies qu'il envoie ensuite simultanément à des acheteurs potentiels - lesquels sont d'ailleurs parfois concurrents entre eux. C'est dire qu'on sera bien forcé de dire bientôt adieu à l'accord de confidentialité, un accord extrêmement difficile à obtenir de toute façon de la part d'un inventeur indépendant.

 

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